Alfred de Musset
EXTRAITS. Morceaux choisis… A Aimée d’Alton, à George Sand
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• • Le temps du bonheur. Ici avec Aimée d’Alton • 1837 •
Il s'agit ici des lettres du poète et d'elles-
Les réponses d'Aimée sont restées privées.
Je crois vous aimer, enfant, et je ne me trompe pas.
Votre santé, dîtes-
Quant à « la femme plus âgée que moi, au visage de plus en plus sérieux » et à « la condamnation » permettez-
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Cependant on vit et il faut aimer pour vivre encore ; on aime avec crainte, avec défiance, et peu à peu on regarde autour de soi, et on s'aperçoit que la vie n'est pas aussi triste qu'on l'avait jugée, on revient à soi, on revient au bonheur, à Dieu, à la vérité.
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Le cœur, plus ferme, accepte les obstacles, les chagrins, les dégoûts même ; sûr de lui, il les prévoit, les combat et les change quelquefois en biens. Plus résigné, il jouit mieux des jours heureux, les appelle avec plus d'ardeur, les prolonge avec plus de soin. Il en vient enfin à se dire : le mal n'est rien, puisque le bonheur existe.
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Laissez battre votre cœur, laissez-
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On a tant de force quand on se sent deux !
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« Tu peux me trahir, m'humilier jamais ! » Mais je vous défie de dire ces mots-
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Venez et on ne vous humiliera pas, Mademoiselle, et on ne vous trahira pas, on fera ce que vous voudrez ! on vous obéira, soyez-
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Vous me suppliez de partir, chère ? est-
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Si vous ne voulez pas venir, baisez un morceau de papier blanc et envoyez-
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Je voulais renvoyer à mon Aimée son petit papier cent fois baisé pour la supplier d'y poser encore les lèvres et de me le renvoyer de nouveau. Je suis forcé d'avouer qu'il sent le tabac et la cire à moustaches – je n'ai pas pensé en le voyant à rendre ma bouche digne d'approcher de la bouche qu'il représente. Ne sachant pas la place où vous l'aviez touché, je l'ai couvert, sucé tout entier – je l'aurais dévoré s'il était moins précieux… Chère âme, quand tes lèvres seront-
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Il me semble qu'à ton premier baiser, il va m'éclore une fleur dans le cœur.
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C'est avec la simplicité des anges que vous êtes venue à moi – c'est en souriant et sans hésiter que vous m'avez fait un aveu que les femmes vendent au prix de mille tortures, de milles comédies et de mille épreuves. Je ne sais si j'ai pour vous plus d'estime ou plus d'amour. Votre caractère n'a pas son pareil.
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Je ne sais si en vous voyant je vais me jeter sur vos lèvres ou tomber à genoux devant vous – chère, chère, Aimée la bien nommée, que je suis heureux de vivre et de t'avoir connue !
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J'ai lu dans quelque endroit qu'il ne faut pas en boire plus qu'on ne vous en verse. C'est une petite vérité – cherchez ce qu'elle peut bien vouloir dire.
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Mais tu viens le 21 ou le 22, et tu ne veux pas, chère idole, que je sois fou de plaisir et d'espérance ! tu me parles du revers de la médaille, tu ne sais donc pas quelle image j'y vois gravée ! Ah ! beauté, tu veux m'apprendre à être sage. Apprends-
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Tes lettres me rendront fou. – A tout instant, il faut que je les relise pour croire à mon bonheur, pour être sûr qu'un si beau rêve n'est pas un rêve.
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Adieu, adieu, mille baisers sur tes lèvres, sur ton corps, sur ton cœur. Tâche donc de ne pas me mettre un vilain pain à cacheter qui me déchire le meilleur. Je t'envoie un petit papier, envoie-
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Pour aller de la rue Saint-
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Je vois, mon amour, qu'il y a sympathie parfaite entre nous. Tu m'annonces un si-
– Je l'ai pris avec un saint respect, j'y ai compté toutes les petites marques, mais il a bien fallu ensuite lui manquer de respect.
Lettres d'Alfred de Musset à Aimée d'Alton,
(Mme Paul de Musset),
Paris, Mercure de France, 1910.
Pour en savoir plus, à la rencontre d'Aimée d'Alton...
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• • La fin d'un amour, ici avec George Sand•
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ci-
en italique et gras, les réponses de la correspondante…
Je t'aime, je t'aime, je t'aime.
Adieu, ô mon George, c'est donc vrai ?
Je t'aime pourtant.
Adieu, adieu, ma vie, mon bien.
Adieu mes lèvres, mon cœur, mon amour.
Je t'aime tant, O Dieu ! Adieu.
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[…] Eh bien, puisque je perds tout, adieu les larmes, adieu, non pas adieu l'amour, je mourrai en t'aimant, mais adieu la vie, adieu l'amitié, la pitié. O mon dieu ! est-
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Ainsi, un mot, dis-
Sera-
Quand tu voudras, quand tu auras une heure, un instant à perdre.
Réponds-
Si c'est dans un mois, j'y serai.
Ce sera quand tu n'auras rien à faire, moi, je n'ai à faire que de t'aimer.
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Tu es triste, chère ange, et je ne sais pas respecter ta tristesse ! Tu me dis un mot qui m'afflige, et je ne sais pas me taire, je ne sais pas sourire, je ne sais pas te dire que mille larmes, que mille affreux tourments, que les plus horribles malheurs peuvent tomber sur moi, que je peux les souffrir, et qu'ils n'ont qu'à attendre un sourire, un baiser de toi pour disparaître comme un songe ! O mon enfant, mon âme ! Je t'ai pressée, je t'ai fatiguée quand je devrais passer les journées et les nuits à tes pieds, à attendre qu'il tombe une larme de tes beaux yeux pour la boire, à te regarder en silence, à respecter tout ce qu'il y a de douleur dans ton cœur ; quand ta douleur devrait être pour moi un enfant chéri que je bercerais doucement.
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Ah, pense à ces beaux jours que j'ai là dans le cœur, qui viennent, qui se lèvent, que je sens là. Pense au bonheur. Hélas ! Hélas ! si l'amour l'a jamais donné, George, je n'ai jamais souffert ainsi. Un mot, non pas un pardon, je ne le mérite pas ; mais dis seulement : j'attendrai, et moi, Dieu du ciel, il y a sept mois que j'attends, je puis en attendre encore bien d'autres. Ma vie, doutes-
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J'ai une fièvre de cheval. Impossible de tenir sur mes jambes : j'espérais que cela se calmerait. Comment donc faire pour te voir ? Viens donc avec Papet ou Rollinat ; il entrerait le premier tout seul, et quand il n'y aurait personne il t'ouvrirait. Après dîner cela se peut bien. Je me meurs de te voir une minute, si tu veux. Aime-
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Certainement, j'irai mon pauvre enfant. Je suis bien inquiète. Dis-
et je passerai pour une garde. Laisse-
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Le bonheur, le bonheur, et la mort après, la mort avec ! Oui tu me pardonnes, tu m'aimes ! tu vis, ô mon âme, tu seras heureuse ! Oui, par Dieu, heureuse par moi. Et oui, j'ai 23 ans, et pourquoi les ai-
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Nous nous aimons, voilà la seule chose qu'il y ait entre nous. Le temps et l'absence ne nous ont pas empêché
et ne nous empêcheront pas de nous aimer. Mais notre vie est-
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L'amour avec toi et une vie de fièvre pour nous deux peut-
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Dis-
fais-
ne t'occupe pas de moi ;
je vivrai pour toi aussi longtemps (sic) que tu voudras,
et le jour où tu ne voudras plus,
je m'éloignerai sans cesser de te chérir et de prier pour toi.
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Si tu reviens à moi, je ne peux te promettre qu'une chose, c'est d'essayer de te rendre heureux. Mais il te faudrait de la patience et de l'indulgence pour quelques moments de peur et de tristesse que j'aurais encore sans doute. Cette patience là n'est guère de ton âge. Consulte-
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O Dieu, ô Dieu ! je te fais des reproches à toi qui souffres tant !
Pardonne-
Je souffre tant moi-
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Je veux embrasser la terre et pleurer.
Je ne t'aime plus, mais je t'adore toujours.
Je ne veux plus de toi, mais je ne peux m'en passer.
Il n'y aurait qu'un coup de foudre d'en haut qui pourrait me guérir en m'anéantissant. Adieu ; reste, pars, seulement ne dis pas que je ne souffre pas. Il n'y a que cela qui puisse me faire souffrir davantage, mon seul amour, ma vie, mes entrailles, mon frère, mon sang, allez-
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En écrivant maintenant, je t'avoue que je me retiens de déraisonner – je voudrais ne pas parler et ne pas sentir jusqu'à samedi ou dormir jusque là en rêvant de toi, et me réveiller pour aller à la fenêtre t'attendre. Le fiacre s'arrête – je te vois descendre – arriver à petits pas, cherchant la porte dans la cour – je cours à toi, je te prends la main, nous montons en silence, tout dort – la porte est enfin fermée derrière nous. -